« Ils ne savaient pas que c’était impossible, alors ils l’ont fait. »
ils sont partis comme ça c’est peut-être la nuit c’est
peut-être le jour – ils n’ont pas encore ouvert
les yeux – et leurs sandales soulèvent une fine poussière
d’os qui leur entre par les narines et tous les pores – leur peau
devient le parchemin d’une aventure indéchiffrable
les fanons de leurs cils protègent leurs pupilles
du vide et de ses dangers
la terre est plate sous leurs pas – parfois
ils trébuchent sur de fines hachures de sable
éblouissant et de terre d’ivoire
– ils avancent
dans une peinture très ancienne
ils vont en ligne droite à la recherche d’une improbable perspective
espérant l’horizon
(il y eut peut-être ici un monde)
Ils sont partis avec toujours les mêmes guides
à leur tête ceux qui les ont depuis toujours
égarés ceux-là même qui effacèrent de leurs yeux
le paysage
et asséchèrent sur leurs lèvres crevassées
la parole du paysage
et crevèrent les yeux du poème
et le tympan des dieux
Fuyant la céramique du désert
partant vers de plus obscurs horizons
ils avancent dans le temps
comme des éléphants dans la neige
pour s’y figer à jamais
deviendront-ils l’ombre de leur ombre
parce que le temps ignore le soleil ?