Deuil du singe,
Cahiers du Loup bleu, Les lieux-Dits, 2018

Extrait

Le plus évolué des singes est incapable de dessiner un singe. Cela aussi, seul l’homme sait le faire. Il est aussi le seul à trouver que c’est un avantage.
Georg Christoph Lichtenberg, (trad. Jean-François Billeter)

Le singe éclabousse les yeux
Envahit les oreilles
Ses mots sur le pavement des mâchoires

Cocher d’un attelage mauve et fou
Le singe bat la nuit
De ses mains de géographie
Coupe frontières et langages

Semeur de joie
Moissonneur de bonheur
Le singe a des épis de blé sous les paupières

Le singe a de la jungle au ventre
Ses pieds nus sur la terre battue
Piétinent le temps

Le singe a dans les yeux
Des branches
Et puis des branches et des branches

On s’amuse ses mots
On danse ses grands bras
On fait comme

Le singe a de la sève aux lèvres
Le singe un peu chancelle…

A sa santé buvons
A nos espoirs recommencés
Le petit peu de temps qui reste

Puisque le singe est mort